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Cette année j’ai eu 18 ans!

soleineBon ok… sur cette photo, je parais légèrement plus âgée! Dire que j’ai 18 ans, est en effet un peu inexact. J’ai 33 ans et je peux dire que j’ai eu deux vies. À l’âge de 15 ans, un événement a bousculé ma vie et celle de ma famille. Ça a changé le cours de mon existence. Je ne voudrais pas sombrer dans le drama mais dans les faits, oui c’est quand même assez tragique.

Lors d’une magnifique journée d’été j’étais chez une connaissance, avec quelques amis. Nous étions des ados comme tous les autres. Nous avons passé l’après-midi à rire, à parler, nous baigner… il y avait une piscine hors-terre. Vers la fin de l’après-midi, un ami de 18 ans est allé au dépanneur et nous a acheté de la bière et de la boomerang. T’sais la limonade traître alcoolisée populaire à la fin des années 90? Voilà qu’après le souper, on décide de retourner se baigner et moi, jeune fille trop pressée, j’ai plongé dans cette fameuse piscine. Qui ne l’a pas déjà fait? Bien moi, c’était ma première fois! On peut dire que je ne me suis pas manquée! Lorsque ma tête a cogné le fond de la piscine, une décharge électrique a parcouru mon corps. D’un coup, je ne pouvais plus rien bouger du bout des orteils jusqu’à la nuque. Mes bras, mon dos, mon ventre, mes jambes… je ne sentais plus rien. Sur le moment je ne le savais pas, mais je resterais paralysée pour le reste de mes jours. En remontant à la surface je faisais l’étoile, le visage vers le fond de l’eau. J’entendais autour de moi : « Aller So, arrête de niaiser, lève-toi… ».  J’ai alors sorti l’air qui me restait dans les poumons pour faire un signe à mes amis, pour leur dire que je ne blaguais pas. « SORTEZ MOI DE LÀ!! » que je criais dans ma tête. Ils ont vu et ils m’ont sorti la tête hors de l’eau. Ils m’ont installé sur le balcon. Ils ont appelé l’ambulance et ainsi, ils m’ont sauvé la vie. Les ambulanciers m’ont intubé et j’ai perdu connaissance.

Ma mère, qui était en train de souper reçoit l’appel d’une femme sous un numéro inconnu. Elle lui dit sur un ton assez dramatique de se rendre immédiatement à l’hôpital Legardeur. Sans détail. Juste ça. La laissant penser au pire. En arrivant on l’amène dans cette petite pièce où je suis seule sur une civière. J’ai un carcan autour du cou et tout ce que je trouve à dire c’est : « Je suis désolée, je suis désolée… ». Mon transfert est organisé pour Sainte-Justine… à 15 ans je suis une enfant! L’ambulance avançait à une vitesse de 30 km\h et ça a pris 2h30 pour s’y rendre. Nos merveilleuses routes québécoises/montréalaises parsemées de nids de poules (on pourrait même parfois parler de nids de dinde!) et de crevasses ont fait en sorte que nous ne pouvions rouler plus vite. La moindre secousse pouvait aggraver mon cas. Cet hôpital sera ma maison pour les 6 prochaines années. Mais ça non plus, on ne le savait pas encore. Tout se passe si vite mais au ralenti en même temps. La terre cesse de tourner. En regardant bien tout autour de nous, la vie continue. C’est surréaliste et on ne peut pas vraiment y croire. Et pourtant… Après une batterie de tests, radiographie, scan, imagerie par résonance magnétique, le verdict tombe. Je me suis fracturée la 5ième cervicale. Elle a éclaté, sectionnant ainsi ma moelle épinière par fragments. Le plus ironique, c’est que ma mère utilisait l’expression « attention, tu vas t’casser l’cou » pour ma sœur, qui était beaucoup plus téméraire que moi étant plus jeune! Bref… Voilà que le calvaire de ma 2e vie commence! Fini mon existence de bipède, bonjour celle de la jeune fille à roulette! Je suis maintenant tétraplégique et si je suis chanceuse, mes bras recommenceront peut-être à bouger. On me mentionne un « peut-être » bien soutenu!

La première opération consiste à installer un halo. C’est une belle couronne de métal vissée autour de ma tête, tenue par quatre vis et qui positionne ma colonne vertébrale très droite. Il ne faut pas qu’elle bouge d’un millimètre car le moindre mouvement peut empirer mon état. Un poids d’une dizaine de livres tire ma colonne vers l’arrière afin de solidifier le tout. La moelle épinière doit désenfler avant la grande chirurgie. Alors je resterai ainsi, sur le dos, pour dix jours. On m’opérera afin de retirer tous les petits bouts de vertèbre qui ont blessé mon système nerveux central et on greffera un os de ma hanche à une arthrodèse cervicale postérieure. Ce sont de grands termes médicaux pour dire qu’on remplace la vertèbre manquante par des vis et des barres de métal dans mon cou. Les forts médicaments que je prenais laissent mon souvenir de tout ça assez flou. C’est sûr que mes parents pourraient raconter tout ça sous un tout autre angle. Une vision plus parentale, de peur, de stress et tout ce qu’un tel accident peut apporter comme émotion. Mais au final, la vie est quand même bien faite pour moi car cette souffrance, j’m’en souviens pas beaucoup. Lorsque j’entre en salle d’op ce que mon orthopédiste espère c’est qu’il me sorte de là en vie. À ce moment-là, c’est tout ce qui comptait pour ma famille. Dans quel état? On n’en savait absolument rien. Huit heures plus tard, je suis en salle de réveil et je souris. La morphine était bonne, vous vous dites?! Oui bien sûr! Mais vous comprendrez aussi que je me suis réveillée. J’étais en vie et pour moi c’était une victoire. Je dirais aussi que ce sourire, cet état d’esprit optimiste donnera le ton aux prochains mois qui suivront. Car pour les semaines à venir, je devrai m’adapter à ma nouvelle condition. La réadaptation sera longue et très difficile mais elle sera aussi remplie d’anecdotes. Si bien qu’aujourd’hui, nous nous remémorons tout ça avec émotion en passant du rire aux larmes! Mais ces histoires et aventures vous seront racontées à un autre moment!

Lorsque j’affirme que j’ai eu deux vies, ce n’est pas que je crois à la réincarnation vous l’aurez sans doute deviné! J’ai vécu celle d’avant de 0 à 15 ans, où juste aller chercher un verre en haut de mes armoires de cuisine était un geste facile, voire acquis. Et celle d’après de 15 à 33 ans, où je dois demander de l’aide pour simplement couper mon steak. La vie n’a pas juste changé, elle a complètement recommencé à zéro. Il a quand même fallut que je réapprenne à manger, écrire et socialiser. Supporter le fait que dorénavant, je me déplace en fauteuil roulant. Je devrai affronter les regards des gens. Voilà pourquoi ce n’est plus la même. Mais je tiens à vous rassurer que je me suis débrouillée pour être heureuse malgré tout. J’ai choisi de vivre et j’ai décidé que j’avais le droit au bonheur. Je ne voudrais pas terminer sur un ton moralisateur, mais oui en même temps! Nous nous devons d’apprécier ce que la vie nous offre et trouver chaque petite joie au travers des drames les plus graves. À nous de faire les bons choix, les assumer et vivre avec les répercussions de nos décisions. Qui sait ce qui peut nous arriver demain?

– Soleine

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  • Catherine - Salut
    Avec ton premier billet j’ai déjà appris quelque chose, j’ai hâte de lire les suivants. Je sais que nous fera rire et peut-être pleurer. L’écriture est aussi un exutoire et si tu te fais du bien, tu en feras aussi à tes lecteurs.
    Merci pour ça et continue, c’est bon bon bon comme du bonbon.
    XXXrépondreannulé

    • Soleine - Merci beaucoup!! J’ai été très émue par ton commentaires! Quelle merveilleuse surprise de te lire.. Merci de me suivre et me faire vivre d’aussi belles émotions 🙂 xxrépondreannulé

  • D’une maman à la mienne » Je suis personne - […] y a évidemment le traumatisme de l’accident qui nous a causé tout un choc et qui nous hante peut-être encore aujourd’hui, chacune à notre […]répondreannulé

  • Cette maison! » Je suis personne - […] L’accident qui a changé ma vie et celle de ma famille a bouleversé bien des choses! […]répondreannulé