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À Louise

Aujourd’hui, ça ne va pas… Pourquoi aujourd’hui? Mystère. Ce n’est pas une date anniversaire pourtant. Aujourd’hui, ça ne va pas et ça fait quelques mois que cela dure…

Cela fait quelques mois que je t’ai perdu mon bébé. Tu aurais été mon premier bébé, ma première fille. Non, excuse moi, tu es ma première fille; car ce n’est pas parce que tu es née sans vie que tu n’es pas mon enfant. Mais comment parler de toi aux autres? Pour moi, j’ai eu un enfant. Je suis maman d’un bébé qui n’a pas survécu. Pourtant, je sens bien que je n’appartiens à aucune catégorie, que je ne rentre dans aucune case. Je suis une maman sans bébé.

J’aimerais pourtant parler de toi sans sentir un malaise autour de moi, sans que ce soit un sujet tabou, sans que l’on essaie de nier ton existence pour essayer d’atténuer ma peine. J’ai besoin de parler de toi car tu fais parti de moi, de ma vie, même si je n’aurais jamais imaginé te perdre si tôt.

Mes rêves ressemblaient plus à ceux de toutes futures mamans avec son lot d’espérances et de craintes. Mais voilà, tu es née ce 18 décembre 2016 et je me souviens avoir follement espérer que tu crierais. Cela faisait 2 jours que je savais que tu étais morte dans mon ventre mais j’espérais quand même; toute cette douleur et cette tristesse ne pouvaient pas être la réalité, c’était impossible, c’était insupportable.

Les premières semaines après ta naissance, j’ai vécu dans un brouillard de douleur et de larmes. Rien ne pouvait me consoler. Je suis passée par tous les sentiments: le déni, la colère, la honte, la culpabilité, la tristesse… Puis, le quotidien a finalement repris le dessus, il m’a fallu retourner travailler, mais je n’étais plus la même, une partie de moi était morte avec toi. Je suis sortie peu à peu de l’isolement dans lequel je m’étais protégée, la vie devait continuer malgré tout. Le soutien et l’attention de mes proches m’ont beaucoup aidé; même si au fond de moi, je savais qu’ils ne comprenaient pas totalement l’épreuve que je vivais.

J’avais toujours planifié ou organisé sur le long terme, je vivais désormais au jour le jour en essayant de gérer des situations quotidiennes qui pouvaient paraître anodines: rencontrer une femme enceinte au supermarché, regarder un film où il est question du deuil d’un enfant, voir jouer une amie avec son fils d’un an, entendre que la grossesse d’une amie de mon mari se passe à merveille (et que le terme correspond à celui de ma grossesse si tout s’était bien déroulé)… « À chaque jour suffit sa peine » était devenu ma façon de fonctionner en attendant d’avoir des réponses à ta perte.

Ces réponses, on me les a finalement données quelques semaines plus tard. J’ai donc appris que je souffrais d’une maladie auto-immune et que c’était cela qui t’avait tué. Tu n’avais aucune malformation, aucune anomalie chromosomique. La grossesse avait révélé ma maladie et tu n’avais pas survécu. Je me suis alors rendue compte que tu m’avais sauvé car sans ton décès, on ne m’aurait jamais diagnostiqué cette maladie ou alors bien plus tard et avec beaucoup plus de complications. Je t’avais perdu mais tu m’avais sauvé et tu avais sauvé tes futurs frères et sœurs car je savais désormais qu’une future grossesse serait possible avec certains traitements.

Aujourd’hui, ça ne va pas mais ça va déjà mieux qu’hier.

Je n’oublierai jamais cet événement de ma vie, je ne t’oublierai jamais mon bébé. Tu m’as sauvé et je te dois d’être forte, d’aller de l’avant même si l’envie n’est pas là. Je te dois de penser à l’avenir.

Je te fais la promesse que tu ne seras pas morte en vain. Il y aura des jours plus durs que d’autres mais je te promets d’honorer ta mémoire en vivant ma vie avec bonheur et passion.

Je t’aime mon adorable bébé, mon héroïne !