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Ne me dites surtout pas que ça aurait été pire plus tard…

« Ça aurait été pire plus tard ». Quand on perd un bébé, cette phrase là on l’entend souvent. Trop souvent. Elle a l’air inoffensive dite comme ça, mais à chaque fois elle frappe comme un grand coup de poing direct au cœur et le brise un peu plus. Pourtant, vous la prononcé sûrement avec de bonnes intentions. Votre façon de rassurer les parents endeuillés en leur disant que c’est probablement mieux comme ça. Que leur peine aurait sans doute été encore plus grande si leur enfant était décédé plus tard dans la grossesse, s’il avait vécu quelques jours ou pire encore… des mois! Vous vous dites que c’est logique puisque les souvenirs feraient encore plus mal s’ils s’étaient accumulés au fil du temps. Je comprends votre intention mais permettez-moi de douter du fondement de votre raisonnement. Comment faites-vous pour savoir que le départ de mon enfant aurait été encore plus douloureux s’il était décédé plus tard? Parce que vous avez malheureusement vécu ces deux drames et êtes en mesure de comparer? Sûrement pas. Alors moi, j’ai le droit de ne pas vous croire. La perte d’un bébé ça fait mal. Si mal, que par moment on a l’impression qu’on ne s’en sortira jamais. J’ai envie de vous dire que la souffrance ça ne se mesure pas et que le deuil ça ne se compare pas. Tout simplement parce que chaque deuil est différent.

Est-ce qu’un père de deux enfants (3 et 5 ans) aura plus de peine si son enfant de 5 ans meurt? Selon cette logique du pire, oui! Puisqu’il a forcément beaucoup plus de souvenirs avec lui qu’avec le plus jeune. Est-ce qu’un couple marié depuis 20 ans souffrira davantage d’une séparation que deux amoureux qui font vie commune depuis seulement quelques années? À vous de me le dire. Avouez que présenté de cette manière ça ne fait pas de sens, hein? Alors je vous dirais que c’est un peu la même chose. Tout le monde a le droit d’avoir mal et d’éprouver de la tristesse. Des échelles de souffrance ou des baromètres de douleur, ça n’existent pas. Si on demandait aux parents endeuillés d’évaluer leur peine sur une échelle de 1 à 10… je vous garantis qu’ils seraient nombreux à vous répondre 12! Et ça, peu importe le nombre de semaines de grossesse ou les circonstances entourant le décès de leur enfant. La mort d’un bébé ce n’est jamais ce qu’on avait envisagé en souhaitant un enfant. Alors quand on vit la perte de cet avenir si longtemps espéré, on a le sentiment de cohabiter avec le pire. Et ce pire, on le vit ici-maintenant. Quand on dit que ça fait mal, c’est qu’on souffre. La dernière chose qu’un parent endeuillé devrait avoir à faire… c’est de justifier sa peine.

Plutôt que de jouer à « Qu’est-ce qui est pire que quoi », ne pourrait-on pas simplement laisser une place au chagrin des parents en accueillant leurs larmes sans chercher à comparer? Sans chercher à minimiser ce qu’ils vivent. Se faire dire que ça aurait été pire plus tard, ça n’a rien de réconfortant. Croyez-moi. Au contraire, c’est blessant. C’est un peu comme se faire répondre que la souffrance ressentie n’est pas justifiée. Même, qu’elle est peut-être exagérée. Pourtant la peine, elle, est bien réelle. Lorsqu’un enfant tombe et se blesse, il a besoin d’être consoler. Que ce soit pour une égratignure ou une fracture, ça ne change rien au fait qu’il a mal. Alors on ne se pose pas de questions, on le prend dans nos bras pour le rassurer et on le réconforte avec amour. La souffrance de l’âme n’est pas différente. Arrêtons de chercher à comparer et ouvrons plutôt nos bras avec compassion vers ces cœurs qui ont besoin d’être consoler.

Alors la prochaine fois que j’entendrai cette phrase, je vous répondrai avec mon plus grand respect que vous avez tort. Parce que non, ça n’aurait pas été pire plus tard… juste différent. Et je souhaiterai sincèrement que vous comprendrez.

Mélanie

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  • Anne-Sophie - Merci Mélanie pour cd texte si juste.
    J’ai répondu que c’était différent et j’ai eu droit à des « oui, mais… », non pas de oui, mais, c’est différent, c’est tout. Parce que justement on doit aussi faire le deuil de souvenirs qui n’ont pas encore eu lieu, qui n’auront jamais lieu. ON doit faire le deuil des projections qu’on avait faite aussi, d’une vie de famille rêvée…répondreannulé

    • Mélanie - Merci Anne-Sophie. Tout à fait, c’est ce que je répond aussi. Chaque deuil est différent et on ne devrait jamais les comparer. Il y a tellement de facteurs qui peuvent influencer notre deuil et notre façon de le vivre. On dit souvent que le père et la mère ne vivent pas le deuil de la même manière. Pourtant ils ont perdu tous les deux le même enfant. La preuve que chaque personne vit son deuil à sa manière. – Mélanierépondreannulé

  • Naomi - Dire que « ca aurait ete pire plus tard » veut dire que la vie d’un bebe vaut moins que la vie d’un enfant plus age. Ou peut-etre que les parents ne connaissaient pas le caractere, personalite, etc. de leur bebe. Les morts-nes sont peut-etre des inconnus pour les autres, mais jamais pour les parents. C’est un enfant comme n’importe d’autre enfant. Ce bebe va vivre dans un coin de ton Coeur toute la reste de ta vie.répondreannulé