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Quand la confiance se brise

Cher chauffeur de taxi,

Aujourd’hui, j’aimerais te parler du sentiment que j’ai, face aux gestes d’agression sexuelle que tu aurais, jusqu’à preuve du contraire, posés envers certaines personnes vulnérables. De potentiels actes qui ont instaurés la peur en de moi puisque j’étais une personne que tu côtoyais lorsque tu commettais ces gestes. Même si tu ne m’as rien fait à moi personnellement, sache que je ne te pardonnerai jamais sur ce que tu as pu faire aux autres.

Depuis que j’ai appris la nouvelle, j’ai peur. Malgré que je ne fusse vraisemblablement pas une victime «idéale», j’ai peur de ce qu’il aurait pu m’arriver si tel avait été le cas. Des attouchements peuvent vite se faire. Quand une personne est en situation de vulnérabilité, même si elle a toute sa tête, c’est encore plus facile. Par ton travail, malgré que tu n’aies certes pas d’autorités, nous étions à ta charge. Tu devais veiller à notre sécurité. Et malheureusement certaines personnes ne l’étaient pas du tout pas quand elles étaient avec toi… quand personne n’était là pour te surveiller.

Malgré que nous avons peu d’informations, je me demande qu’est-ce qu’il s’est passé dans ta tête pour commettre ces gestes…

Depuis 10 ans, je suis membre du transport adapté de l’entreprise de taxis pour qui tu agissais à titre de sous-traitant. Sache que tes actes ont donnés une très mauvaise image pour eux. Quand j’ai commencé à prendre de transport adapté, j’étais aux aguets. Pas paranoïaque mais vigilante. Au fil du temps, la confiance envers toi et tes collègues s’est instaurée. Ma crainte s’est graduellement estompée. Par contre, le jour où la police a informée la population des gestes qui ont été commis, cette confiance s’est envolée. Depuis cette nouvelle, la confiance envers tes ex-collègues est revenue… ou presque. L’idée d’être victime de tels gestes de leur part, demeure dans ma tête… mais c’est gérable. Je sais qu’ils savent que je suis consciente de ce qui est «politically correct». Ils savent que je n’ai pas peur de dénoncer auprès de supérieurs une situation qui me déplais. J’ai tout de même encore peur qu’il puisse m’arriver une telle situation. Pour ces collègues que tu ne connaîtras, espérons-le, jamais, la confiance est beaucoup plus difficile à créer. Je suis gentille, mais je suis très distance. Je ne passe plus par quatre chemins quand je leur parle. C’est malheureux pour eux, mais c’est une conséquence. En d’autres mots, même si tu ne m’as rien fait personnellement, je me sens interpellée. Même si je n’ai aucune déficience intellectuelle, je suis incapable de comprendre le «pourquoi» de tes gestes. Même si la police et les médias m’assurent que je ne faisais pas partie de la clientèle ciblée, je pense que j’aurais pu l’être. J’ai souvenir d’une fois qui aurait pu être une occasion pour t’inciter à commettre ces gestes. Peut-être que j’ai tord… mais je me rappelle que la rue était déserte et que j’étais seule avec toi durant ce trajet. Que j’étais vulnérable.

Somme toute, j’en retire du positif. Parce que malgré le fait que je suis handicapée, je sais maintenant que si je suis victime d’attouchements ou agressions sexuelles il m’est possible d’être cru par les responsables du transport adapté et de la police. C’est une inquiétude dont je n’avais jamais parlé avant.

Je ne sais pas qu’elle sera l’issue des accusations portées contre toi, mais si elles sont fondées, j’espère tellement que tu comprendras l’ampleur de tes gestes. J’espère aussi que si d’autres chauffeurs étaient tentés de faire comme toi, ils prendront conscience que s’ils se font pincés… leurs gestes ne seront pas sans conséquence.

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